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La sensibilité élevée, l’amour de soi et la relation amoureuse… Entretien avec Saverio Tomasella

Écrit par Rédaction

Saverio Tomasella est docteur en psychopathologie et docteur en management des organisations. Il a fondé le Centre d’Études et de Recherches en Psychanalyse en 2008, puis L’Observatoire de la sensibilité en 2016. Il est également à l’origine de la Journée Mondiale de la Sensibilité en 2019, qui a lieu chaque année le 13 janvier.

Lui-même ultrasensible, il est l’auteur de nombreux livres sur ce sujet, traduits dans le monde entier.

Nous l’avons interrogé sur l’amour… de l’autre, bien sûr, mais aussi de soi. Pour voir ou revoir cette interview passionnante et pleine de sensibilité, cliquez sur la bannière ci-dessous.

 

Les hypersensibles

 

Beaucoup de personnes se reconnaissent dans cette appellation sans être réellement hypersensibles, d’autres ne supportent plus cette étiquette, car le sujet est très médiatisé.

D’après des études anglo-saxonnes fiables, la haute sensibilité concerne environ 30 % de la population. Il s’agit d’une sensibilité supérieure à celle de la plupart des gens. Il est d’ailleurs plus approprié de parler de haute sensibilité car le préfixe « hyper » fait référence à « trop », et le terme « hypersensibilité » est médical, faisant référence aux allergies.

On ne peut pas faire un portrait-robot des personnes à sensibilité élevée, mais on peut relever cinq caractéristiques principales :

  • Le traitement sensoriel approfondi des informations : les personnes à sensibilité élevée sont sans filtre, méticuleuses et ont le sens du détail ; dans le cerveau, le thalamus, qui fait le tri des informations, a une activité moins importante chez elles.
  • La saturation : l’hyperstimulation, liée à ce tri moins « performant », conduit à la saturation. Il est donc nécessaire d’identifier les moments de saturation et de prendre des pauses, des moments seuls.
  • Les émotions sont plus fortes, plus intenses, plus durables, plus variées et plus complexes ; il existe une importante porosité aux émotions des autres (ressenti des émotions, de l’atmosphère des lieux, des groupes). Les neurones miroirs sont plus activés chez les ultrasensibles, ainsi que l’insula (ils ont donc une conscience de soi plus aiguisée et se posent plus de questions).
  • Le sens des nuances : les ultrasensibles accordent beaucoup d’importance à l’implicite et au langage non verbal, qui est largement pris en compte.
  • La sensibilité avantageuse : un enfant très sensible (appelé « enfant orchidée ») qui grandit dans un environnement de stress, etc., va être plus souvent malade, pourra devenir, par exemple, le bouc émissaire de sa classe, développer de l’anxiété, une déprime… Ce même enfant, dans un environnement favorable sera en meilleure santé, aura de meilleurs résultats, sera plus créatif et saura mieux profiter des bonnes choses de la vie que les autres enfants. Voilà pourquoi on parle de sensibilité avantageuse.

Il n’y a pas de rupture entre les personnes sensibles et les personnes très sensibles. Le fait de connaître sa sensibilité permet de mieux vivre dans une société qui n’est pas très favorable aux personnes sensibles.

Il y a des moments de la vie où l’on est plus sensible (bouleversements hormonaux, deuils, etc.), néanmoins certaines études tendent à prouver que les gènes seraient différents chez 35 ou 40 % des personnes hautement sensibles. Chez les autres, cette caractéristique peut être liée à des traumas ou au contraire à une éducation où la sensibilité est valorisée, donc stimulée, car perçue comme une qualité (famille d’artistes, par exemple).

 

 

L’intimité

 

Nous vivons dans une société qui nous pousse vers l’extériorité : se montrer, se faire voir, se faire entendre également, du fait des réseaux sociaux mais aussi d’une technologie très axée sur le visuel. Une conséquence pourrait être de nous priver d’une habitude très saine, l’habitude de l’intime. L’intime, c’est l’intériorité et la capacité de partager avec une autre personne notre vie intérieure, cette partie réelle, authentique, et la singularité de nos ressentis.

Moins on passe de temps avec soi-même, avec son intériorité, moins on est capable de percevoir ce que l’on ressent et de l’exprimer.

On peut donc se poser la question suivante : « Est-ce que je consacre suffisamment de temps chaque jour à être avec moi-même ? »

Être avec soi-même ne passe pas uniquement par la méditation, ça peut être écouter de la musique, lire des livres qu’on aime, se balader, prendre soin de son corps, prendre du temps pour faire sa toilette, etc. Avant même de parler d’amour de soi, on s’intéresse à ce que l’on aime : c’est un temps d’amour. À partir du moment où l’on prend ce temps pour soi, on va commencer à être capable de partager ces moments avec un autre, d’en parler, ou de les vivre avec l’autre.

Nous avons besoin de revenir à plus de sensorialité (sentir un parfum que l’on apprécie, par exemple) parce que c’est le fondement de l’amour, de la relation amoureuse et de la sexualité. C’est la relation que l’on a, grâce aux six sens (dont la kinesthésie : l’équilibre du corps, le mouvement), au monde : dès qu’il y a sensorialité, il y a un plaisir qui est immédiat. Elle est une source de connaissance du monde et de soi. À cultiver pour mieux se connaître, elle permet de définir ce que l’on aime ou pas et donc de permettre de préciser sa personnalité. Elle rend plus apte à la communication et au choix des personnes qui s’accordent avec cette sensorialité.

 

 

La singularité et l’impermanence

 

Nous avons tendance à ne pas être suffisamment dans le corps. Pour revenir à un bon équilibre, nous pouvons trouver comment revenir au corps et écouter ses ressentis.

Il n’y a pas de mode d’emploi pour les relations. Au contraire, nous avons besoin de spontanéité. Il est nécessaire d’accepter sa singularité et le changement : nous ne sommes pas toujours linéaires. Nous n’avons pas une identité qui serait la même toute la vie. La vie est impermanente et plus on est souple et flexible avec cette transformation, plus on est capable d’ajuster, de faire preuve de spontanéité : le corps et l’inconscient ont une sagesse à laquelle on accède en sortant du contrôle. Cela permet de rencontrer des personnes différentes.

Lorsque l’on n’accepte pas l’impermanence, on est dans le contrôle et l’on souhaite que les choses restent figées.

En France, pour traduire le « I’m safe » américain, très utilisé en développement personnel, nous employons le mot « sécurité » ; or, il signifie « Je suis bien, je suis à l’aise ». La notion de sécurité tend à figer les choses alors que l’expression originale permet l’impermanence. La vie est mouvement, l’absence de mouvement est la mort. Lorsqu’on le refuse, on est un peu mort.

Lorsque l’on accepte de lâcher cette notion de sécurité, on se prépare à l’impermanence, de soi-même et de l’autre. Du temps est nécessaire pour avancer dans cette direction, or c’est un chemin qui est agréable, qui facilite les relations et qui permet de n’être ni rigide ni fermé.

 

 

La vulnérabilité

 

La vulnérabilité est fondamentale. Les fragilités sont dues aux traumatismes et aux situations difficiles vécues. La vulnérabilité est, elle, liée au fait d’être humain (nous sommes mortels).

Plus on accepte sa vulnérabilité et ses fragilités, moins on est dans l’illusion de fausse force et plus on est dans la connaissance de ses limites (qui peuvent changer d’une journée à une autre, selon la fatigue, etc.).

On a conscience de sa vulnérabilité et de ses ressources, de ce que l’on peut faire ou pas.

Au début de la relation, on n’est pas conscient de tout ce qui se passe, on est porté par la puissance de l’amitié ou de l’amour : on a en partie conscience de sa vulnérabilité et de celle de l’autre et on les accepte à ce moment-là. Lorsque les relations commencent de façon extrêmement fortes, on est branché sur les vulnérabilités et les forces de l’autre. C’est plus compliqué quand la magie s’atténue et qu’on se retrouve face à des défauts, des manques ou des attentes déçues. Deux choix sont alors possibles : soit on a accepté sa vulnérabilité, soit les choses se ferment. Lorsque l’on n’accepte pas la vulnérabilité de l’autre, c’est que l’on n’a pas accepté la sienne.

Lorsque la magie s’atténue, il est important de garder le cœur ouvert et d’avoir confiance dans sa propre capacité à accepter l’impermanence.

 

 

Le moment présent

 

Pour beaucoup d’occidentaux, le moment présent est quelque chose d’abstrait, de mental… La formulation « Je suis présent à moi-même dans mon corps » est plus évocatrice. On peut tout à fait faire des projets dans une relation et être heureux de ces projets tout en étant dans le corps. C’est l’anticipation soucieuse qui est problématique pour la relation.

Nous sommes dans une culture du reproche, de la critique, du jugement. Il est grand temps de nous en libérer. Si l’on ne dit pas de choses désagréables à l’autre, le champ des possibles reste ouvert même si c’est un moment de flottement ou que la situation n’évolue pas comme on le souhaiterait.

Nous sommes culturellement nourris par les comédies romantiques et par les romans : il est important dans la réalité de la relation amoureuse de ne pas chercher à imiter des choses que l’on aime retrouver dans la fiction. Il est important également de savoir que la relation amoureuse ne va pas ressembler à ces histoires, ni à ce que l’on a vécu précédemment, ni aux relations de son entourage ou de ses parents.

La comparaison nous empêche d’accepter la singularité de la relation amoureuse que l’on est en train de vivre. Il n’y a pas un seul schéma amoureux et l’on peut montrer son amour par des petites attentions plutôt que par des mots par exemple. Il est primordial de laisser l’autre exprimer son amour à sa façon.

 

 

Le silence mental

 

Nous sommes conditionnés par la société et par le marketing des vingt dernières années à nous comparer les uns aux autres mais il vaudrait mieux écouter nos ressentis (je suis bien, je suis à l’aise, je ne suis pas à l’aise, etc.), qui sont des indicateurs très fiables de ce qui est bon pour nous.

Il est important de vivre des moments de silence mental ; on peut, bien sûr, méditer mais il y a d’autres façons d’apaiser son mental : on peut pratiquer un sport, écouter de la musique, aller au cinéma, voir ses amis, jouer aux cartes, cuisiner, jardiner… Chacun doit trouver la façon qui lui convient de se vider la tête, cela permet d’avoir ensuite des intuitions beaucoup plus justes. Revenir à plus de simplicité permet que les réponses soient ensuite évidentes. En cultivant les évidences, on trouve le flow.

 

 

Le conditionnement familial

 

Nous sommes profondément, durablement et intrinsèquement marqués par la façon dont nous avons été aimés par nos parents et par notre famille car nous avons fait des déductions de ces premières relations, des choses que l’on nous a dites. Nous avons besoin de nous déconditionner et de nous départir de ce que nous avons intégré : tant que nous ne le faisons pas, nous répétons dans nos relations amoureuses la place et le rôle que nous avons tenu dans la famille.

Il est nécessaire d’avoir de l’aide pour démêler ce qui vient de soi et ce qui résulte du conditionnement. La relation en elle-même permet souvent de prendre conscience de certains aspects de cette programmation.

Les meilleurs thérapeutes et coaches sont ceux qui tiennent compte de la sagesse de l’inconscient, du corps, de la vie, qui ne sont pas dans le contrôle, dans l’obtention de résultats, ce qui retarderait l’accomplissement de cette sagesse profonde.

 

 

L’enfermement

 

Chaque fois qu’une personne s’enferme par surprotection et qu’elle fait le vide affectif autour d’elle, elle va se sentir soulagée dans un premier temps. Heureusement, à un moment, la vie refait surface et il est possible qu’il y ait, par exemple, une rencontre qui n’était pas attendue : il s’agit d’accueillir ce que la vie nous propose même si on pense que ce n’est pas le bon moment. Si l’on s’enferme malgré tout, le corps va s’exprimer par des insomnies, une maladie, etc.

Nous pouvons plutôt danser avec la vie, avec l’autre, ce qui demande d’avoir la capacité de s’adapter. Il est nécessaire de laisser les autres nous enseigner également leur façon de vivre certaines situations plutôt que de s’enfermer dans ses certitudes personnelles. Toutes les personnes rencontrées ont des choses à nous enseigner, sur la vie, sur elles-mêmes ou sur nous. Cette attitude de réception permet toujours d’apprendre quelque chose.

« Se laisser aimer par la vie, par les autres, par soi-même » est un terme plus adapté que le terme « s’aimer soi-même ». Cette sagesse, d’accueillir ce qui est, est ce qui va permettre d’être plus équilibré. Le mouvement (sport, danse, balades, etc.) est un facteur d’équilibre également car il évacue le stress. Saverio Tomasella conseille de se lever régulièrement, même au travail, pour bouger, pour respirer, pour sentir une huile essentielle… Il s’agit d’intégrer ces bonnes habitudes dans son quotidien.

 

 

Se laisser aimer par soi-même et s’aimer soi-même : la différence

 

Lorsque l’on éprouve de la difficulté à s’aimer soi-même pour diverses raisons, on a besoin de se chérir, de se chouchouter, de s’occuper de soi : cela peut passer par le fait de manger quelque chose que l’on aime, par s’offrir une jolie chose, par passer du temps à faire les choses que l’on aime, avec ses enfants, par lire un bon roman, etc. On peut avoir cette attitude même si l’on n’éprouve pas d’amour de soi, car elle facilite son apparition.

C’est un cheminement qui permet à la fois de faciliter l’amour de soi et de faciliter la relation aux autres.

Il peut y avoir des jours où la relation à soi et aux autres fluctue beaucoup. Le mieux est d’accueillir ce que l’on ressent et apprécier les moments que l’on vit, sans vouloir être constamment dans une émotion très positive. Nous sommes toujours la meilleure version de nous-mêmes en fonction de ce que nous pouvons faire dans le moment présent.

 

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